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Ce n’est pas la première fois que les Iraniennes descendent dans la rue. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ?

Written by Homa Hoodfar, Professor of Anthropology, Emerita, Concordia University

Le monde a les yeux rivés sur les images d’Iraniennes scandant le slogan « femmes, vie, liberté », organisant des manifestations, dansant dans les rues et brûlant leur foulard devant des soldats armés.

Ce courage rappelle leur participation massive aux manifestations qui ont suivi le résultat contesté de l’élection présidentielle de 2009, où la jeune Neda Agha-Soltan avait été tuée par balle, victime de la brutalité du régime iranien.

Des gens portent des affiches d’une jeune femme
Dans cette photo prise lors d’une manifestation à Paris en 2009, la foule brandit des photos de l’Iranienne Neda Agha-Soltan.
AP Photo/Jacques Brinon, File)

Le mouvement de contestation qui soulève actuellement le pays a été déclenché par la mort de Mahsa Amini, la jeune Kurde iranienne qui a succombé à ses blessures après son arrestation pour avoir, selon la police, enfreint les lois conservatrices de l’Iran sur le port du hijab.

La révolte populaire se poursuit malgré une intensification de la répression policière partout au pays qui a fait plus de 200 morts et des centaines de blessés, et a entraîné des milliers d’arrestations.




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Une vague de colère

Dans un geste sans précédent, des Iraniennes de tous les âges expriment leur soutien envers les manifestations en coupant leurs cheveux, symbole préislamique de deuil chez les femmes.

Cette fois, c’est la mort en détention de la jeune Amini qui a déclenché les manifestations. Mais les revendications des citoyens contre l’oppression politique, les difficultés économiques, les catastrophes écologiques, la discrimination envers les minorités ethniques et religieuses, les institutions étatiques corrompues et non représentatives, ainsi que le mépris pour la vie et la dignité des citoyens ont soulevé de nombreuses révoltes populaires au cours des dernières décennies.

La République islamique continue de faire la sourde oreille face aux manifestations, affirmant que la mort de Mahsa Amini est le résultat d’une maladie. De la même façon, l’État avait tenté de camoufler ses gestes après avoir abattu un avion de ligne ukrainien en janvier 2020. Ces démentis laissent un goût amer aux Iraniens, désillusionnés par le régime théocratique.

Ce nouveau mouvement de contestation, ayant à sa tête des femmes, appelle à la dignité, à un vrai changement et au respect des droits fondamentaux. Dans le passé, les Iraniennes ont toujours pris part aux manifestations, mais c’est la première fois que leurs revendications sont considérées comme celles de toute la nation.

Une voiture jaune apparit dans un nuage de gaz
Dans cette photo prise le 1ᵉʳ octobre 2022, les forces de l’ordre utilisent du gaz lacrymogène pour disperser les manifestants devant l’Université de Téhéran.
(AP Photo)

Les femmes revendiquent le changement – encore

De nombreuses femmes sont descendues dans la rue pour participer au renversement de la dynastie Pahlavi en 1979 et pour revendiquer la démocratie et la liberté d’expression sans discrimination fondée sur le sexe.

Cependant, quelques semaines à peine après la révolution, le clergé dirigeant conservateur accède au pouvoir, piétinant les modestes avancées accordées aux femmes sous l’ancien régime.

Malgré leurs protestations, les Iraniennes ne reçoivent qu’un très faible appui de la part des hommes et des groupes politiques rivaux, qui donnent la priorité à la position anticolonialiste du régime au détriment de la justice envers les femmes, temporairement disent-ils.

Découragées par l’indifférence des hommes, les Iraniennes organisent en mars 1979 l’une des toutes premières manifestations contre la théocratie. Le port obligatoire du voile décrété par le régime islamiste comme symbole de son identité demeure un point de litige entre le gouvernement et la société civile.

Extrait des manifestations de 1979 sur les droits de la femme en Iran sur ITN.

Reconnaissant que l’extrémisme religieux met souvent l’accent sur le corps des femmes – comme le font d’ailleurs certains pays modernes – les Iraniennes continuent, autant dans la sphère privée que publique, à remettre en question la négation de leurs droits légaux et sociaux.

À plusieurs reprises, comme nos recherches l’ont montré, les femmes de toute appartenance idéologique ont uni leurs forces pour faire valoir leurs revendications.

Par exemple, des femmes prônant la laïcité et d’autres vivant selon des valeurs religieuses unissent leurs voix pour réformer certaines lois discriminatoires à l’égard des femmes concernant la famille dans les années 1990 et au début des années 2000. En outre, c’est la création d’un bloc pour le vote des femmes qui permet au candidat réformateur du clergé Mohammad Khatami d’assumer la présidence de 1997 à 2005, ce qui mène à de nombreux changements législatifs et à de nouvelles occasions politiques.

Ce mouvement de réforme met l’accent sur une nouvelle idéologie religieuse, y compris une réinterprétation des textes sacrés axée sur la femme, aussi appelée féminisme islamique.

Les conservateurs nerveux

Toutefois, ces progrès menacent l’élite ultraconservatrice qui, sous le régime du nouveau président Mahmoud Ahmadinejad, commence à imposer des restrictions sur la presse féminine et de nombreuses organisations non gouvernementales de femmes.

Les tenants de la ligne dure intimident également les militants pour les droits des femmes et les groupes d’étudiants universitaires progressistes. Pour plaire à l’élite conservatrice, le président Ahmadinejad renforce l’appareil répressif de l’état, créant notamment une force policière chargée de faire appliquer les lois très strictes sur le port du hijab, une décision applaudie par les conservateurs.

En 2009, les espoirs des femmes sont ravivés lorsque les principaux candidats réformateurs à l’élection présidentielle, dans un effort pour gagner des votes, placent les préoccupations des femmes au cœur de leur campagne électorale. Malheureusement, à leur grande consternation, c’est le président Ahmadinejad qui remporte l’élection, ce qui déclenche une vague de manifestations où les femmes jouent un rôle de premier plan.

Les soulèvements liés au mouvement vert permettent de rendre publiques les principales revendications de la population générale, y compris les droits civils et politiques de base, comme le droit à des élections justes, la liberté d’expression et la démocratie. Mais la puissante élite conservatrice non élue déchaîne les forces de l’ordre afin de réprimer brutalement les manifestations de 2009, forçant le mouvement féministe à battre en retrait.

La candidature du religieux modéré Hassan Rohani à l’élection présidentielle de 2013 incite les femmes à retourner aux urnes, menant à une victoire écrasante.

Un contrôle total

Aux élections suivantes, les conservateurs écartent leurs principaux rivaux pour reprendre le contrôle du parlement et de la présidence en 2021, malgré une participation électorale au plus bas depuis 1979.

Maintenant en plein contrôle de l’État, le régime conservateur met en œuvre de nombreuses restrictions, exhortant les forces de l’ordre à multiplier la surveillance et les interventions à l’égard des personnes remettant en question le statu quo, y compris les femmes s’opposant au port obligatoire du voile.

Les manifestations déclenchées en septembre 2022 se poursuivent, et les violences répressives du Régime se multiplient. Malgré la censure de l’Internet, les Iraniens, indépendamment de leur sexe, de leur ethnie, de leur classe sociale, de leur âge ou de leur idéologie, semblent s’exprimer d’une même voix en organisant des manifestations aux quatre coins du pays pour dénoncer leur mécontentement face au régime théocratique.

On ne sait pas encore si ce mouvement mènera à une révolution politique. Plusieurs sont d’avis que la révolution a déjà eu lieu, étant donné l’appui grandissant du public envers les demandes formulées par les femmes et les minorités dans ces manifestations pour une véritable démocratie et le respect des droits de la personne.

La question est maintenant de savoir si cette solidarité durera, et si le régime iranien sera enfin disposé à faire preuve d’ouverture.

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

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